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20 Mai 2017
Les responsables de l’Organisation de défense des droits de l’Homme (Survie ) , considèrent qu’en se rendant auprès des troupes françaises déployées au nord du Mali la semaine de son investiture, Emmanuel Macron assume l’interventionnisme militaire qui a marqué le quinquennat de François Hollande et de son ministre Jean-Yves Le Drian. Ils qualifient la visite au Mali du plus jeune président de la France d’un symbole de plus, en quelques jours, de la perpétuation d’une politique africaine faite d’ingérence et de soutien aux dictateurs. Selon Survie, le nouveau président de la République, qui cherche à aligner les images symboliques depuis son élection, pour illustrer son soutien aux forces militaires françaises déployées au Sahel et affirmer ainsi au nom de la « lutte contre le terrorisme » une totale continuité avec François Hollande. Le « bilan africain » de ce dernier étant en grande partie celui de Jean-Yves Le Drian, passé de la Défense aux Affaires étrangères à la faveur du « renouvellement » à la tête de l’État, Emmanuel Macron met ainsi en œuvre un des piliers de « sa » politique africaine, la prolongation de l’ingérence militaire. Celle-ci n’est toujours pas questionnée soutient Survie, alors même que la situation actuelle au nord du Mali, mais aussi en Libye, en Côte d’Ivoire et en Centrafrique, fragilise chaque jour la vitrine d’un interventionnisme étranger victorieux incarné par Le Drian au côté du locataire de l’Elysée.
Les membres de Survie estiment que le refrain de la fin de la Françafrique, brandi successivement par Sarkozy puis par Hollande, n’a pas été repris dans cette campagne présidentielle, à l’exception de la grossière tentative d’instrumentalisation de Marine Le Pen. Mais les déclarations du candidat Macron à certains médias spécialisés et les premiers choix politiques lourds de sens ne laissent guère d’illusion. Celui qui a promis de faire passer le business franco-africain et la stabilité des régimes en place au nom de la lutte contre le terrorisme avant le respect des droits humains, a choisi un Secrétaire général de l’Elysée issu de l’Agence française de développement, un Premier ministre grand défenseur des intérêts d’Areva sur le continent et un ministre des Affaires étrangères qui était déjà le « ministre de l’Afrique » s’affichant volontiers avec certains des pires dictateurs du continent lors du quinquennat précédent.
En conclusion,Survie argumente que le Tchadien Idriss Déby peut continuer à faire emprisonner des militants, le Congolais Sassou Nguesso peut laisser pourrir la crise humanitaire dans la région d’un opposant, le Gabonais Ali Bongo peut réprimer sans fin la contestation populaire : ils ne craignent aucune condamnation publique, et encore moins le gel de l’aide bilatérale ou la suspension des relations de coopération militaire et policière qui les unissent à la France. Survie croit que la nomination d’une ministre des Armées interroge quant à elle, avec un tel intitulé de sa fonction, sur la feuille de route donnée à cette juriste de formation face au pouvoir discret mais croissant de la Grande Muette sur la politique africaine de la France, alors même que l’opération Barkhane, déployée depuis 2014, n’a jamais été approuvée par le Parlement, en violation de l’article 35 de la Constitution. L’association Survie rappelle à l’opinion nationale et internationale qu’elle continuera son travail de décryptage, d’information et de mobilisation pour mettre enfin un terme aux mécanismes tant institutionnels que mafieux de la Françafrique. Car consciente comme tant d’autres organisations de défense des Droits de L’homme ou autres africains soucieux du devenir de leur continent. Survie croit qu’en matière de politique africaine, plus encore que dans les autres domaines, les vieilles recettes resteront de mise sous ce quinquennat.
Ahmat Zéïdane Bichara