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13 Janvier 2019
La cavale de la jeune saoudienne Rahaf Mohammed al-Qunun s’est terminée de la plus belle manière si l’on en croit la dépêche de l’AFP du vendredi 11 janvier selon laquelle le Canada a accepté de lui accorder l’asile. L’annonce de cette décision a été faite par le Premier ministre en personne Justin Trudeau. Le Canada entretient actuellement des relations assez exécrables avec l’Arabie Saoudite depuis un certain temps mais particulièrement après l’assassinat ignoble du journaliste Jamal Khashoggi en Turquie. La jeune saoudienne de 18 ans se dirigeait déjà vers Toronto vendredi lorsque la décision a été rendue publique par monsieur Trudeau. Peu de temps après que les autorités thaïlandaises eurent annoncé le départ de Rahaf Mohammed al-Qunun à destination du Canada, le Premier ministre a tenu à faire une déclaration à la presse sur ce sujet : «Nous lui avons accordé l’asile. Nous sommes ravis de le faire, car le Canada est un pays qui mesure à quel point il est important de défendre les droits de la personne et des femmes à travers le monde. Et je peux confirmer que nous avons accepté la demande de l’ONU ». Cela vient mettre un terme à une situation dramatique qui s’est très rapidement amplifiée en raison de sa médiatisation faite par elle-même par la création à la va-vite d’un compte Twitter. La jeune femme qui était en voyage au Koweït avec sa famille, avait décidé de fuir le week-end dernier à l’aéroport international de Bangkok, où elle avait été arrêtée par la police.
L’asile qui lui a été accordé par le Canada, va sans nul doute attiser les tensions entre les deux pays. En août 2018, les autorités saoudiennes ont expulsé l’ambassadeur canadien et ont rappelé le leur aggravant par le gel de tout nouveau commerce ou investissement avec Ottawa. Le courroux de Ryad s’explique par la dénonciation par Ottawa de l’arrestation de militants saoudiens des droits de l’Homme, parmi lesquels se trouve Samar Badaoui, sœur du blogueur incarcéré Raef Badaoui, dont la femme et les trois enfants ont trouvé refuge à Sherbrooke, au Québec. «La demande formelle d’asile a été transmise par l’ONU au Canada. Nous respectons nos engagements envers l’ONU. Le pays d’origine (Arabie saoudite, ndlr) n’intervient pas dans le processus », a précisé un responsable canadien ayant requis l’anonymat. La jeune femme était déjà placée sous protection du Haut Commissariat aux réfugiés de l’ONU en Thaïlande après avoir alerté l’opinion publique internationale sur son sort via Twitter. Elle disait vouloir fuir les abus psychologiques et physiques de sa famille et demander l’asile à plusieurs pays, dont l’Australie comme premier choix. L’ONG Human Right Watch a également indiqué qu’elle souhaitait renoncer à l’islam, d’où les risques de représailles à son encontre.
La Thaïlande s’est ravisée au dernier moment après avoir voulu la renvoyer vers son pays à la demande des autorités saoudiennes. Pour déjouer ce piège, la jeune femme s’est enfermée dans une chambre d’hôtel de l’aéroport, s’évertuant à envoyer sur Twitter plusieurs messages et vidéos d’appel au secours, ce qui lui a permis de toucher rapidement l’opinion internationale. Une forte mobilisation via les réseaux sociaux a contraint les autorités thaïlandaises, qui sont promptes à refouler les illégaux à la frontière, avaient abandonné la décision de la renvoyer contre son gré et l’avaient autorisée lundi à quitter l’aéroport en compagnie des représentants du HCR. Le Chef de la police de l’immigration thaïlandaise, Surachate Hakparn avait déclaré mercredi à la presse que «Le HCR va trouver un pays tiers pour l’accueillir d’ici à deux jours », tout en précisant par ailleurs que « plusieurs pays » avaient proposé de l’accueillir. Selon la police thaïlandaise, le père et un frère de la jeune femme s’étaient déplacés à Bangkok, mais qu’elle avait «refusé de les voir ». L’Arabie saoudite est réputée pour être l’un des pays les plus conservateurs en matière des droits de femmes. Ces dernières sont notamment soumise à une tutelle d’un homme (père, mari, autre) qui exerce sur elles une autorité excessive voire arbitraire et prend à leur place les décisions importantes.
Moussa T. Yowanga