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8 Février 2021
Peu de temps après avoir quitté la Maison-Blanche au profit de son successeur démocrate Joe Biden, le républicain Donald Trump sera bientôt jugé par le Sénat même s’il est improbable qu’il soit reconnu coupable d’incitation à l’insurrection suite à l’envahissement du Capitole par ses partisans, selon l’information publiée le dimanche 07 février par RTBF citant l’AFP. L’’ancien président américain pourrait également être inculpé au pénal, pour des allégations liées à ses nombreuses affaires, au risque de ranimer les tensions politiques. Reclus dans sa luxueuse résidence de Floride, Donald Trump est un familier de longue date des tribunaux civils, avec une armada d’avocats prêts à se mobiliser pour le défendre comme pour porter le fer contre ses adversaires. Dépourvu de son immunité présidentielle, il risque désormais de subir une inculpation inédite, au moins une enquête pénale conduite par le procureur de Manhattan, Cyrus Vance, un démocrate qui se démène depuis des mois pour se procurer huit ans de déclarations fiscales et bancaires de l’ancien président américain.
Embourbé dans une affaire des paiements effectués, avant la présidentielle 2016, à deux maîtresses présumées du milliardaire, l’enquête s’oriente également vers de possibles allégations de fraude fiscale, fraude aux assurances, ou bancaire. La Cour suprême s’en est mêlée en ordonnant l’an dernier au prédécesseur de Joe Biden de remettre au procureur les documents demandés, mais ses avocats ont fait appel pour contester l’étendue des documents demandés. Pour le magnat de l’immobilier, l’enquête n’est qu’une «pire chasse aux sorcières de l’histoire des Etats-Unis ». La décision de la haute cour est encore attendue. Le dossier, instruit à huis-clos devant un grand jury, semble avancer malgré tout. Les enquêteurs de M. Vance ont interrogé, selon des médias américains, des employés de la Deutsche Bank, ancien financier de Donald Trump et sa holding, la Trump organization et de sa compagnie d’assurances, Aon. L’ex-avocat personnel du président, Michael Cohen qui purge une peine de prison, a été réinterrogé. Il a affirmé précédemment devant le Congrès que Trump et empire gonflaient ou réduisaient artificiellement la valeur de leurs actifs, pour alternativement contracter des prêts bancaires ou obtenir la réduction de leurs impôts. Ces allégations font aussi l’objet d’une enquête menée par la procureure démocrate de l’Etat de New York Letitia James. Elle a réussi à auditionner l’un des fils Trump et obtenir des documents sur certaines propriétés familiales après une lutte très serrée contre les avocats du milliardaire républicain. Elle a affirmé que son enquête est de nature civile, mais «si nous découvrions des faits criminels, elle changerait de nature ». Si ces accusations étaient avérées, elles exposeraient l’ex-président à une possible incarcération. Et contrairement aux délits fédéraux, les violations de lois des Etats ne sont pas graciables par le président américain. Quand bien même Joe Biden, qui a fait vœu de réconciliation, le souhaiterait.
Une bonne frange anti-Trump se réjoui d’ores déjà de cette perspective d’inculpation de l’ancien président. Toutefois, le climat politique délétère risque de dissuader les procureurs avant de lui demander des comptes, ont indiqué à l’AFP plusieurs juristes.«Personne ne va se précipiter », souligne Daniel Richman, ex-procureur et professeur de droit à l’université Columbia.«La dernière chose qu’on veut, c’est que le processus (judiciaire) soit utilisé ou perçu comme étant utilisé comme un instrument politique », souligne-t-il. « Il y a deux écoles », souligne Roberta Kaplan, avocate qui mène trois actions au civil contre l’ex-président. « Je suis de l’école qui pense qu’on ne doit pas s’interdire de rendre justice par peur de jeter de l’huile sur le feu. Si on n’agit pas pour dire clairement que les principes sur lesquels repose ce pays s’appliquent à tout le monde, président ou autre, je pense qu’on court des dangers bien plus grands ». Selon Gloria Browne-Marshall, professeure de droit à l’université de la ville de New York (CUNY), un Donald Trump au banc des accusés constituerait « un dénouement logique », « un scénario à la Al Capone », légendaire gangster des années 20 finalement condamné en 1931 pour évasion fiscale. Mais même si elle croit probable son inculpation avant la fin de l’actuel mandat de Cyrus Vance en novembre elle ne parierait pas sur un procès ou une condamnation à terme. Avec des millions de partisans potentiellement prêts à financer sa défense, Donald Trump pourrait contre-attaquer avec ses propres actions judiciaires et faire traîner les dossiers « des années durant », dit-elle. Obligeant les procureurs des élus dépendants de l’argent des contribuables à mobiliser des ressources considérables pour mener la bataille, a-t-elle conclu.
Moussa S. Yowanga