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REGARDS D'AFRICAINS DE FRANCE

Informer sans travestir ni déformer, c'est notre combat !

Afrique : « Toute la partie Ouest du continent est dans une période de tensions et de fragilités », constate Jérôme Pigné chercheur.

Lundi, un attentat a frappé le Burkina Faso, deux attaques meurtrières ont également visé les Nations Unies. Le mardi un attentat-suicide fait 28 morts et 80 blessés au Nord-est du Nigéria. Quel autre pays d’Afrique de l’Ouest serait-il visé par des attaques terroristes ? La Rédaction est souvent consternée à chaque fois qu’elle apprend comme tant d’autres médias des mauvaises nouvelles d’attentats dans le monde et plus particulièrement en Afrique. Le Saviez-vous, la région d’Afrique de l’Ouest est souvent en proie aux attaques des islamistes ? Pour savoir plus sur ce qui se passe dans cette partie du continent en matière d’attaques terroristes, votre Rédaction vous met en ligne l’interview de Jérôme, chercheur et coordinateur pour un réseau de réflexion stratégique sur la sécurité au Sahel, qui répondait aux questions de Matin Prem1ère hier mercredi 16 août 2017.(Ahmat Zéïdane Bichara).

Matin Prem1ère : Le Conseil de sécurité des Nations unies discute ou évoque en tout cas la constitution d’une force internationale anti-djihadiste au Sahel. La situation sur le terrain est-elle urgente ?

Jérôme Pigné : Oui, tout à fait. Elle urge non pas parce qu’il y a eu une attaque supplémentaire cette semaine à Ouagadougou, mais parce que depuis plusieurs années, le Mali s’est décomposé progressivement et il y a eu des conséquences : la prolifération de groupes islamistes radicaux du nord Mali vers le centre Mali, dans toute la région de ce qu’on appelle le Liptako-Gourma, qui est la région des trois frontières qui concernent le Mali, le Niger et le Burkina Faso. Et historiquement, d’autres pays comme la Mauritanie, plus à l’ouest, ont été aussi touchés il y a une dizaine d’années et sur le front est, il y a évidemment au nord toute la situation avec la Libye et la région du bassin du lac Tchad, où le Tchad lui-même, qui est très impliqué dans la sous-région, a été victime d’attaques terroristes à plusieurs reprises sur son territoire national. Donc ce n’est plus seulement une question malienne, mais c’est une question maintenant aujourd’hui sous-régionale. On avait bien évidemment conscience, à Paris ou ailleurs, d’une situation fragile sur le plan socio-économique, sur le plan politique, sur le plan de la gouvernance nationale.

 Qu’est-ce qui explique cette lente décomposition ?

Alors malheureusement, pour les partenaires, pour les spécialistes du développement et pour la coopération internationale, on savait. C’est-à-dire qu’au lendemain de la crise du nord Mali par des séparatistes Touaregs affiliés progressivement à l’époque à des groupes dits islamistes radicaux, on avait bien évidemment conscience, à Paris ou ailleurs, d’une situation fragile sur le plan socio-économique, sur le plan politique, sur le plan de la gouvernance nationale et sur la gouvernance au niveau local. Ce sont des fragilités structurelles dont on voit aujourd’hui seulement les conséquences. Mais on ne pouvait pas dire qu’on ne savait pas. Ce qu’on n’arrive pas à faire, c’est à changer ces aspects structurels, c’est-à-dire au niveau économique, au niveau politique et au niveau social.

 Qu’en est-il aujourd’hui des actions qui sont menées sur place ? 

Il y a trois niveaux d’intervention. D’abord, la capacité nationale au niveau des forces de sécurité et de défense des États de la sous-région. Le deuxième niveau, le niveau régional, avec le Conseil de sécurité et la résolution au niveau du pays du G5 Sahel. Et évidemment le troisième niveau, l’implication des partenaires internationaux. La France est évidemment au-devant de la scène avec son opération Serval en 2013, devenue Barkhane depuis l’été 2014, qui s’étend sur toute la sous-région. Vous avez évidemment l’implication plutôt sur les questions d’urgence humanitaire, de développement et d’accompagnement politique au niveau des Nations unies, au niveau de la Banque mondiale, etc. Donc l’action est multipartie, multiacteurs et elle intervient dans différents secteurs du développement ou par les situations de crise humanitaire aux aspects de coopération militaire et sécuritaire. L’Allemagne, si on prend au niveau de l’Europe, s’implique de plus en plus, notamment dans un pays comme le Niger dans la région d’Agadez. Et donc il y a une implication crescendo des partenaires extérieurs, parfois au niveau bilatéral et parfois à un niveau multilatéral, comme au niveau des Nations unies ou de l’Union européenne par exemple.

 Le Burkina a été la cible dimanche soir d’une attaque. On parle évidemment souvent du Mali. Est-ce que cette tache d’huile pourrait s’étendre à d’autres pays voisins ?

La problématique des frontières est primordiale évidemment. Il n’y a pas aujourd’hui de pays qui est à l’abri d’une menace. Le risque 0 n’existe pour aucun des pays de la sous-région. Il y a évidemment un focus sur ce qu’on appelle l’espace sahélo-saharien ou la bande sahélienne, mais en Afrique de l’Ouest, on a bien vu que la Côte d’Ivoire avait elle aussi été victime ces dernières années d’attaques. Donc évidemment il y a, comme je le disais, cette région du Liptako-Gourma sur les 3 frontières, il y a la Mauritanie, il y a le Tchad. Plus au nord, les pays du Maghreb ont beaucoup de leurs ressortissants qui sont allés rejoindre les camps de Daech en Irak et en Syrie. Et évidemment toute la région du bassin du lac Tchad, avec l’implication de pays comme le Bénin, le Nigéria, le Cameroun. Ce sont des pays qui sont également ciblés, donc c’est toute l’Afrique de l’Ouest en fin de compte qui est dans une période de tensions et de fragilités. Propos recueillis par Matin Prem1ère.

 

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