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REGARDS D'AFRICAINS DE FRANCE

Informer sans travestir ni déformer, c'est notre combat !

Education : « Le retour des pédagogies alternatives : quand l'école se réinvente », Jean-François Herbecq.

Le journaliste belge Jean-François Herbecq spécialisé dans le domaine de l’éducation eut largement consacré un reportage avec un constat d’un spécialiste, dont son reportage a été publié par la RTBF. Il croit que : « L'école change : l'offre en matière d'enseignement s'élargit à chaque rentrée scolaire. Cela vaut dorénavant tant pour le réseau libre, qui ne se limite pas au confessionnel, qu'il soit ou non catholique, que pour les écoles publiques, communales ou de la Fédération Wallonie-Bruxelles ». Selon lui, vu la crise de l'institution scolaire, les pédagogies alternatives ont du succès depuis une dizaine d'années. Parmi les derniers arrivés, le lycée intégral Roger Lallemand dans la commune bruxelloise de Saint-Gilles : installé dans les locaux d'une ancienne école technique et professionnelle, il propose dès la rentrée de septembre un enseignement général secondaire de pédagogie active. Et cela en accord avec les objectifs généraux du décret « Missions » de la Communauté. Sur son site, les devises « Apprendre pour être libre » et « On apprend au travers de ce que l'on est » indiquent une pédagogie « intégratrice » qui vise à donner du sens aux apprentissages. Ce principe se retrouve dans les principaux courants de pédagogie alternative : Freinet, Steiner, Montessori ou Decroly. Et ces courants pédagogiques reviennent à la mode, sous diverses interprétations. Tous se présentent comme alternatives au modèle classique qui privilégie la relation enseignant-savoir et la forme du cours magistral. Ces nouvelles pédagogies se recentrent au contraire sur l'enseigné. Ces courants qui reviennent à la mode aujourd'hui ont pourtant pour la plupart un siècle d'histoire : ils ont été initiés au début du 20ème siècle ou entre les deux guerres, observe Bernard Delvaux, responsable de recherche en sociologie de l’éducation à l'UCL.

Chacun possède cependant ses propres caractéristiques et finalités. Il insiste en disant que souvent dotées de processus de reconnaissance peu formels, sans beaucoup d'agréations, ces écoles à pédagogies alternatives apparaissent sous des variantes assez variées. Avec Steiner et Freinet, Montessori est l'une des plus étendues internationalement avec près de 20 000 écoles qui se réclament de ce courant. Malgré cela c'est toujours une goutte d'eau par rapport à l'enseignement plus traditionnel, mais c'est croissant, dit Bernard Delvaux. Montessori se distingue par l'usage de matériel, un matériel concret mis à la disposition de l'enfant, cubes, cylindres, objets emboîtables, lettres découpées...Ceci vise un apprentissage partiellement autonome de l'enfant ce qui leur permet d'interagir entre eux et de les faire travailler en petits groupes qui s'entraident sans que l'enseignant soit au centre. Montessori qui se développe beaucoup en France actuellement travaille, tout comme Freinet d'ailleurs, sur la question des inégalités, avec des populations marginalisés, fragilisées ou dominées, même si aujourd'hui, en fonction des pays et des situations, différents types d'enseignements se réclamant de Montessori coexistent, certains visant les classes moyennes montantes dans les pays en voie de développement, d'autres mis en place par des ONG ciblent des publics plus précaires. Il cite un exemple bien connu, la pédagogie Freinet qui voit le jour après la Première guerre mondiale, souhaitait « mettre en place des pédagogies qui évitaient la reproduction de ce phénomène ». Ici, on met l'accent sur la collectif, l'éducation citoyenne, note le chercheur. « Des espaces de discussion démocratique en classe, c'est proche de la pédagogie institutionnelle, où l'on discute et résout les règles et les conflits ». Steiner a plutôt pris une option spirituelle, liée à l'anthroposophie, et « met en avant des notions d'épanouissement individuel et de relation à la nature, au beau, à l'esthétique et au sacré », note Bernard Delvaux. Des points que l'on retrouve à Decroly, dont la pédagogie active tourne le dos aux programmes et manuels existants pour faire la place à des activités manuelles, sportives, artistiques et sociales : il s'agit de développer l'enfant avec ses propres paramètres. D’autre écoles existent encore, comme les Sudbury à pédagogie très libre, où les élèves sont responsables de leur apprentissage et qui pratiquent une sorte de démocratie directe : les élèves décident ce qu’ils font de leur temps sans programme fixe.

Notre confrère Jean-François Herbecq se penche sur un point commun à toutes ces pédagogies, la tendance, nouvelle, qui date d'une dizaine d'années, à ne plus se limiter à l'enseignement fondamental, plus facile à réinventer, et à se développer aussi dans le secondaire. Et donc beaucoup d'écoles, comme le Lycée intégral Roger Lallemand, initiative d'un groupe d'enseignants, les « Pédagonautes », « réinventent ces pédagogies, les hybrident, les mélangent », note Bernard Delvaux. Pareil avec le « Groupe belge d'éducation nouvelle » qui emprunte à différents courants, dit-il, citant encore l'exemple d'une filière Steiner existant à l'IATA à Namur, des écoles communales à Liège ou Freinet à Gand. Bernard Delvaux relie cette évolution qui date d'une dizaine d'années « à la crise de l'institution scolaire et au changement profond de la société ». Son livre « Une toute autre école » (2015) développe d'ailleurs la thèse selon laquelle les profondes transformations sociétales dont la révolution numérique ont remis en cause l'école comme lieu de transmission de savoir tout comme la légitimité des enseignants. Il considère que chaque fois qu'il y a eu une profonde révolution au niveau des techniques de communications, poursuit le chercheur, comme avec l'apparition du langage, puis de l'écrit, de l'imprimerie, et à présent de la révolution numérique, on assiste à de tels changements, qui ne touchent pas que les enseignants, mais remettent aussi en question la légitimité des journalistes, celle des juges et des politiques car les connaissances circulent différemment aujourd’hui. Obligées de se remettre en question, les écoles se repositionnent en fonction de leur histoire mais aussi des attentes de leur public. Elles imaginent des solutions variables, dit Bernard Delvaux qui constate une tendance à « une plus grande fragmentation de l'institution scolaire avec une différenciation accrue des écoles, qui reviennent à l'école d'antan, l'école élitiste, l'école musulmane, ou à pédagogie alternative. » On le voit donc, l'éventail est large : beaucoup d'écoles sont en recherche, elles vont emprunter à différents courants.

Ahmat Zéïdane Bichara

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