16 Janvier 2019
L’article de la journaliste Camille Toussaint , publié depuis hier mardi 15 janvier 2019 par la RTBF où il est question de l’acquittement de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo.Comme d’autres dirigeants africains avant lui indique la journaliste Camille Toussaint, l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo a été acquitté par la CPI, la Cour pénale internationale, devant laquelle il était poursuivi pour crimes contre l’humanité. Ce jugement ravit ses partisans, mais soulève des questionnements au niveau juridique. Comment interpréter cette décision ? Soir Première a posé la question à Eric David, professeur émérite de droit international à l’ULB.En tant que spécialiste de la justice internationale, Eric David se dit surpris par ce jugement de la CPI : « Cela me surprend dans le sens où Gbagbo, étant donné sa position de chef de l’Etat au moment des faits, avait un devoir de prévention et de répression par rapport à ce qui a été commis pendant cette période de trouble qui a suivi les élections de 2010. C’était lui le président sortant. Et pourtant, j’ai le sentiment, dans la mesure de ce que je sais, qu’il n’a pas fait tout ce qui était en son pouvoir pour assurer cette prévention ».Selon lui, il y a notamment eu des lacunes au niveau du travail du bureau du procureur : « Le dossier n’est pas bien ficelé, et certains éléments ne sont pas bien plaidés.
Selon toujours notre consoeur Camille Toussaint, il a tellement d’éléments qui plaident en faveur d’une culpabilité de l’accusé qui sont ignorés… Cela me parait étrange ».Comment dès lors expliquer la décision des juges ? Ont-ils trouvé plus d’obstacles que de raisons de condamner les responsables ? Pour répondre à cette question, Eric David rappelle que d’autres affaires font penser à celle-ci…« Il y en a eu plusieurs : l’affaire Bemba en RDC, l’affaire Kenyata au Kenya. A chaque fois, les poursuites ont été abandonnées. Si l’on examine l’affaire Bemba, par exemple, la différence entre le jugement en 1ère instance et le jugement en appel est interpellante. En 1ère instance, toute une série d’éléments troublants ont été retenus pour le condamner à l’unanimité des trois juges. Ensuite, en appel, la Cour a constaté que la Chambre de 1ère instance n’avait pas tenu compte de certains éléments à la décharge de Bemba. Et surtout, toute la série d’éléments extrêmement probants qui avait été cités par la Chambre en 1ère instance est passée à la trappe. C’est interpellant, et pour moi, il s’agit d’une espèce de prudence tout à fait excessive ».Pour le professeur, il ne faut cependant pas voir derrière ces décisions des manipulations politiques : « Je n’ai pas le sentiment que ce n'est pas de la politique, mais plutôt un excès de juridisme. La Cour veut être sûre que ces jugements ne pourront prêter aucunement le flanc à la critique. Les juges n’ont pas d’arrières pensées politiques, mais c’est une forme de frilosité, une peur de mal faire. Ils préfèrent être prudents et ne pas condamner ».
La Rédaction