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REGARDS D'AFRICAINS DE FRANCE

Informer sans travestir ni déformer, c'est notre combat !

Burundi:Les pères boivent, les familles jeûnent

(Syfia Grands Lacs/Burundi) Pour de nombreux fonctionnaires pères de famille du Burundi, dépenser une grande partie ou tout son salaire dans les cabarets est considéré comme normal. Peu importe que leur famille soit sans le sou et affamée, que leur femme et leurs filles se prostituent pour survivre…

 "Nous buvons comme des trous et nos enfants s’amaigrissent car ils n’ont rien ou presque à mettre sous la dent", reconnaît Nestor M., enseignant dans un lycée du sud de la capitale burundaise, Bujumbura. Tous les fonctionnaires interrogés font le même triste constat mais se défendent en disant qu’il leur est impossible de couper court avec cette habitude de fréquenter les cabarets. "Quand le groupe des amis ne te voient pas le soir deux fois de suite, ils commencent à dire que tu es maîtrisé par ta femme. C’est en fait ton honneur qui est en jeu", explique Justin Nzambimana, un septuagénaire. "L’honneur est malheureusement trop onéreux, surtout pour nos fonctionnaires qui ont des salaires modiques !", estime Libérate K., une maman qui prend en charge seule cinq enfants. 

 Boire tout son salaire:La bière est en effet chère et les hommes en consomment sans modération. Entre juillet 2012 et mai 2013, les prix des produits de  la Brasserie ont augmenté au moins deux fois, parfois jusqu’à 20%. Pourtant tous les soirs, comme si les buveurs allaient en réunion, ils continuent de prendre d’assaut les cabarets.Les  fonctionnaires les plus sobres prennent en moyenne deux bouteilles par jour et y dépensent… plus de la moitié de leur salaire mensuel. Des salaires pourtant modiques. "Un ingénieur des mines qui a une ancienneté de 20 ans, un directeur de département du ministère de l’Education, un directeur général du ministère de l’Environnement, tous ces cadres touchent à peine 200.000Fbu (129$). S’ils sont modestes et boivent uniquement deux bouteilles, ça va leur coûter 102 000Fbu (65$)", calcule Albert N., cadre enseignant. Pour les fonctionnaires les moins sobres, "c’est, d’après toujours Albert, non seulement tout le revenu qui y passe mais encore des découverts demandés auprès des banques."Pendant que les chefs de ménage gagnent en ventre, les enfants et la mère, eux, n’ont plus que la peau et les os. Selon les données fournies par l’Institut international  sur les politiques alimentaires (IFPRI), le Burundi est le pays du monde le plus malnutri en 2012. La malnutrition chronique touche 58% des Burundais.L’argent consommé au cabaret pour deux bouteilles par jour peut pourtant permettre à toute la famille de constituer un stock mensuel d'aliments de base : 30 kilos de haricot, 30 kilos de riz et 30 kilos de pomme de terre. Impossible pour la famille de le faire comprendre aux papas à la soif inextinguible. Ils rentrent tard la nuit, quand les victimes de cet égoïsme sans nom sont plongées dans un sommeil profond. Ils quittent très tôt le matin la maison pour le travail  avant que personne ne se soit levé. Il s’agit de jouer à cache à cache afin d’éviter d’être questionné sur la fuite de leurs responsabilités de père de famille.

  Se prostituer pour manger:Des mères de famille qui n’ont pas d’alternatives comme le petit commerce, les appuis de la famille élargie…en arrivent à se prostituer pour nourrir leurs enfants. Certaines d’entre elles poussent clandestinement même leurs filles encore mineures à chercher un peu d’argent par ce biais. Tous les soirs de la semaine, mères et jeunes filles se postent dans l’ombre dans les coins des rues de la capitale, guettant le passage d’un client. Interrogée sur sa présence tout près d’une banque à 20h un jour de la semaine, une fille âgée visiblement de 16 ans répond : "Notre famille mange tous les jours de la semaine, l’argent pour la ration se cherche donc tous les jours de la semaine."Ces mères et ces filles sont bien conscientes des dangers que présente leur stratégie de survie. Ce n’est pas de bon gré qu’elles sifflent tous les passants, y compris les plus affreux. Elles ont fait un choix douloureux : mourir du Sida dans 10 ans plutôt que de mourir de faim immédiatement. Leurs pères, inconscients, s'appliquent eux au quotidien à ne pas mourir de soif…

 

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