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REGARDS D'AFRICAINS DE FRANCE

Informer sans travestir ni déformer, c'est notre combat !

Soudan : Les Djandjawids sont-ils une organisation terroriste ?

             Chronique de Kébir Mahamat Abdoulaye, économiste et analyste Tchadien

Avant 2003 et de la tragédie au Darfour Soudanais, personne n'a entendu parler des Djandjawids. En effet parler des Djandjawids cela nécessite même d'écrire un long texte, un ouvrage mais je présente une analyse en quelques paragraphes et invite le lecteur davantage vers la lecture des livres, documentations. Les Djandjawids, comment sont-ils nés ? Qui sont les Djandjawids ? Comment sont-ils formés ? Qui sont ceux leurs agents financiers, ceux qui leur fournissent des armes ? Où opèrent-ils ? Quels sont leurs objectifs ? Sont-ils des forces paramilitaires ou des milices à la solde de l'armée soudanaise ou une organisation hors contrôle de l'Etat Soudanais ? Comment ont-ils pris de l'ampleur dans leur mouvement, leurs exactions, leurs crimes, leur génocide... contre les populations civiles et autres groupes armés ? Comment les combattre juridiquement, économiquement, militairement... ? Pour bien comprendre le but de cette analyse, quelques faits géographiques et historiques peuvent aider chacun(e) à mieux être dans le bain. Le Darfour, désigne étymologiquement le pays des Fours, peuple noir, une grande ethnie vivant avec d'autres groupes ethniques (Zaghawa, Massalit, arabes noirs et plusieurs autres...), tous noirs et islamisés.

Le Darfour est un vaste territoire situé à l'Ouest et Sud du Soudan, peuplé d'environ 6 millions d'habitants. Le Darfour est un territoire riche en agriculture, pétrole, élevage...et un carrefour entre un Nord arabe dominant politiquement, économiquement et un Sud noir en grande majorité chrétienne et animiste. Le mode de vie des populations du Darfour se caractérise par deux types de groupes, les sédentaires/agriculteurs majorité composés des noirs, les nomades/éleveurs composés essentiellement par des arabes. Cette situation socio-économique est la source de diverses tensions, exacerbées par la sécheresse et la manipulation politique du gouvernement Soudanais, surtout après la naissance de la rébellion au Darfour pour sévir contre le Mouvement pour la Justice et l’Egalité (MJE) et autres groupes armés composés essentiellement des ethnies Four et Zaghawa. Le premier conflit du Darfour s'est déroulé de 1987-1989 en raison des tensions ethniques, entre les Fours et les Arabes. Puis le deuxième conflit eut lieu entre 1996 et 1998. Cette fois, ce sont les Massalit qui se soulèvent contre les Arabes. Quand le Soudan a accédé à l’indépendance en 1956 sous colonisation britannique, les  élites arabes du nord se sont imposées au pouvoir à Khartoum jusqu'à nos jours, tandis que les régions périphériques, l'Ouest qui est le Darfour et le sud, peuples des Dinka, Nouer, Shillouk...continuent à être marginalisées économiquement et politiquement. Aujourd'hui le Darfour malgré ses richesses en agriculture, élevage, pétrole... est faiblement développé, qui dispose à peine 700 km de routes bitumées. En résumé, c'est cette situation de marginalisation qui était à l’origine du conflit du sud-Soudan jusqu’en 2005, puis du Darfour depuis 2003.

Le Darfour connaît un retard de développement économique important, aggravé par des famines récurrentes liées aux qui frappent de façon récurrente la zone sahélienne depuis les années 80. C'est l'un des facteurs qui anime les tensions interethniques, exacerbées et manipulées plus tard par le gouvernement Soudanais après la naissance de la rébellion au Darfour d'où, la résurgence et la montée en force des Djandjawids. Les différentes ethnies (Massalit, Zaghawa et  beaucoup d'autres du Darfour ont payé un lourd tribut en fournissant l'essentiel des troupes à l'armée Soudanaise pour aller se battre contre la rébellion SPLA (Mouvement de libération de Sud du Soudan) du Sud dirigée par le Colonel John Garang. A l'époque, le gouvernement Soudanais s'appuyait sur des milices pour combattre les rebelles du Sud Soudan pour commettre des exactions et crimes de guerre. Ces milices s'appelaient plus tard des Djandjawids après la crise dans le Darfour. Ils sont recrutés parmi les populations de Darfour pour combattre John Garang et plus tard contre la rébellion au Darfour. Après l'accord de paix au Sud Soudan qui a abouti à son indépendance, la crise de Darfour déjà en gestation commence par la création de rébellion comme le MJE(Mouvement pour la Justice et l'Egalité) qui a bénéficié d'important soutien au Tchad en raison de l'appartenance ethnique. Sans oublier le soutien fort actif apporté au MPS lors de sa présence sur le territoire soudanais par les Darfouris (Zaghawa Soudanais), et beaucoup sont arrivés à s'installer au Tchad. La solidarité tribale et ethnique bat son plein pendant plus de deux décennies jusqu’à le rêve et projet de la création d'un grand Dar Zaghawa. En effet les Zaghawa du Soudan exigeaient le retour de l'ascenseur aux parents au Tchad lorsqu'ils combattaient les forces gouvernementales Soudanaises et le régime de  Omar Hassan el-Bechir. Ce dernier en soupçonnant le régime de N'Djamena de soutenir la rébellion du Soudan commence à armer des rébellions tchadiennes et à réactiver les milices pour commettre des exactions, crimes et génocides dans le Darfour. Ce que l'armée soudanaise ne peut faire au risque d'être accusée au niveau international, elle encourage ses milices, Djandjawids.

Donc les milices Djandjawids sont l'instrument de sale besogne contre les groupes armés et les populations civiles du Darfour surtout contre les populations issues des organisations politico-armées comme le MJE(Mouvement pour la justice et l'Egalité), en anglais JEM, composés essentiellement des ethnies Four, Massalit, et surtout le Zaghawa. Depuis 2003, date de début de la guerre au Darfour, les conflits ont occasionné la mort de plus de 300.000 personnes plus de 2 millions de déplacés réfugiés entre le Tchad, la RCA(République centrafricaine) et à l’intérieur du Soudan.Les Djandjawids recrutés essentiellement parmi les tribus arabes comme Abbala, par leurs chevaux lourdement armés, appuyés notamment par les forces gouvernementales Soudanaises qui nettoient d'abord les zones par des bombardements, en 8 ans ont pillé, brûlé et détruit quelques 1600 villages dans le Darfour. Ils ont commis de massacres sur les civils, perpétrés de pires atrocités, crimes de guerre, crimes contre l'humanité.Oui les Djandjawids ont une organisation terroriste par leur terreur, leurs exactions, massacres de civils, prisonniers, de crimes de guerre, crimes contre l'humanité et qui agissent en dehors des lois, conventions internationales en matière de guerre, conflits armés, de protection des populations civiles et des droits de l'homme.

Malgré un accord de paix signé et en application entre le Tchad et le Soudan par la visite historique du président tchadien à Khartoum mettant fin à la guerre interposée, la présence des forces internationales de maintien de la paix de l'ONU(Organisation des Nations Unies), UA(Union Africaine), la création des forces mixtes entre les deux pays au niveau de frontière pour la sécurisation et maintien de la paix, la marginalisation des organisations armées (rébellions) du Darfour par l'assassinat du chef charismatique du MJE(Mouvement pour la Justice et l'Egalité), Brahim Khalil, la mort de Kadhafi, grand soutien armé et financier de la rébellion du Darfour, le retour relatif de la paix au Darfour....; les conflits et tensions interethniques n'ont pas complètement disparu et les menaces de guerre et des conflits armés sont élevés d'abord, en raison de chaos en Libye et de la reconfiguration de la situation géopolitique dans la région et au niveau international. C’est dans ce contexte que 22 tchadiens (paix à leurs âmes) sont lâchement assassinés par les Djandjawids il y a quelques jours. Un massacre hautement condamnable et les auteurs doivent être poursuivis et traduits en justice. Mais jusqu'à quand les Djandjawids agissent impunément et continuent à tuer des civils, militaires tchadiens et commettre des massacres et crimes de guerre même si l'ampleur a baissé ?

                   Chronique lue et validée par le Directeur de Publication (DP)

 

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