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REGARDS D'AFRICAINS DE FRANCE

Informer sans travestir ni déformer, c'est notre combat !

Europe: « C’est inquiétant de voir que l’Europe se bloque, se ferme, et utilise tous les moyens possibles pour ne pas accueillir de réfugiés »,déclare Patrick Delouvin

  

Certaines informations publiées antérieurement dans un contexte particulier sans aucun lien parfois avec la situation actuelle, néanmoins sans s’en rendre compte chemin faisant, leurs conséquences bien qu’elles soient lointaines, pourraient se prolonger et marquer de façon pernicieuse et dissimulée l’avenir d’un peuple tant sur le plan politique que social. Dans cette interview publiée par le journal de Secours Catholique, Caritas France N° 687 du mois de février 2014, dont les propos ont été recueillis par la journaliste Marina Bellot, Patrick Delouvin, ancien responsable du Service réfugiés d’Amnesty International en France a assené quelques vérités qui demeurent encore d’actualités compte tenu des enjeux liées à la politique migratoire qui agite les pays membres de l’Union européenne, pris individuellement ou collectivement. Partout ailleurs, les questions relatives à l’immigration et sans oublier celles qui touchent les réfugiés politiques bien que parfois les réalités ne soient pas les mêmes partout, surtout qu’elles sont parfois délicates et sensibles, elles sont toujours investies par les acteurs de la société civile à travers le monde. Cette implication agissante permet de dénoncer les abus et les dérapes souvent constatés lors de prises de décisions par les gouvernants qui agissent le plus souvent sous la pression de leur public de plus en plus exigeant et surtout intolérant vis-à-vis de l’étranger. Dans cet entretien, notre consœur Marina Bellot précise bien que son interlocuteur Patrick Delouvin possède une expertise sur le sujet pour avoir rédigé un rapport en 2008 dénonçant l’irresponsabilité de certains Etats européens en matière d’accueil des réfugiés ou des immigrés tout naturellement. 

Marina Bellot : La France est-elle l’un des pays de l’union européenne (UE) qui enregistrent le plus de demandes d’asile ?

Patrick Delouvin: Non, loin de la ! En nombre relatif, si l’on compare le nombre de demandes à la population du pays, la France se trouve en moyenne, ces dernières années, au 10e rang dans l’Union Européenne(UE). Au niveau européen, on constate même une baisse significative du nombre de demandes. Il y’a certes eu des pics, par exemple dans les années 1990, lors des guerres des Balkans. Mais si l’on regarde toutes les grandes crises du monde ces trente dernières années, on se rend compte que le nombre de demandeurs d’asile en Europe est resté relativement faible. Comparez au reste du monde : les afghans sont partis par millions au Pakistan et en Iran. Les Syriens sont plus de 2 millions en Jordanie, au Liban et en Turquie. Heureusement que ces pays laissent leurs frontières relativement ouvertes. Et d’ailleurs, la Communauté Internationale et l’Union Européenne(UE) elle-même leur demande de le faire ! C’est inquiétant de voir que l’Europe se bloque, se ferme, et utilise tous les moyens possibles pour ne pas accueillir de réfugiés et leurs mettre des bétons dans les roues. La France est championne en la matière. C’est le pays qui utilise le plus le visa de transit aéroport portuaire (VTA) : il y’a aujourd’hui une trentaine de pays dont les ressortissants, si leur vol transite par la France, ont besoin non seulement d’un visa pour le pays dans lequel ils veulent se rendre, mais aussi d’un visa pour passer la France. Et la liste des états concernés s’est allongée au fil des crises mondiales : elle concerne l’Afghanistan, l’Irak, Haïti …

Comment les Etats-Unis gèrent ils l’accueil des réfugiés ?

Les Etats-Unis ont fait face il y a quelques années à l’arrivée de bateaux d’haïtiens et de cubains. Même méthode que l’UE : ils les ont interceptées en mer et refoulés, sauf examen de quelques demandes sur un bateau américain en pleine mer, qui ont abouti à l’acceptation des ‘ bon refugiés’. Et puis finalement, que s’est-il passé ? Ils ont ouvert des camps réfugiés haïtiens et cubains sur la base militaire de Guantanamo. A Amnesty international nous avons eu la possibilité de visiter ces camps : ils sont entourés de barbelés, les tentes sont posées sur un tarmac d’aéroport en goudron, brulant, en plein soleil. Les conditions y sont extrêmes dures. C’est une véritable punition. L’Australie, elle a payé l’Etat Nauru pour qu’il ouvre des camps sur l’Île et accueille les réfugiés notamment les Afghans et les Irakiens qui tenaient de rejoindre les terres australiennes dans l’espoir d’échapper à l’horreur dans leur pays.  

La France, qui se prévaut d’être la terre des Droits de L’Homme a-t-elle toujours été aussi crispée sur cette question ?

Non, dans les années 1970-1980, la France a su prendre ses responsabilités pour accueillir des réfugiés du Cambodge, dub Vietnam et du Laos .100 000 personnes ont été accueillies. Notre pays a su créer un système d’accueil en mettant autour de la table les pouvoirs publics et les associations, dont le secours catholique, la Croix-Rouge, la Cimade… Mais aujourd’hui, quand il s’agit de faire venir quelques centaines de personnes, la France dit non, avec ces arguments : « On aide ces pays, on se démène politiquement et diplomatiquement pour résoudre les crises, et notre système d’asile est saturé, donc on ne peut pas accueillir de réfugiés ». Oui, le système est saturé, mais c’est dû à dix ans de non engagement de l’Etat sur ces questions.

              Choix et commentaire de Moussa T. Yowanga/ Ahmat Zéïdane Bichara

  

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