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REGARDS D'AFRICAINS DE FRANCE

Informer sans travestir ni déformer, c'est notre combat !

Tchad : Ministres kleenex et le culte de la personnalité

          Editorial signé Déli Sainzoumi Nestor, Éclairages n°85 du 03 mars 2020

A Bongor, après la cérémonie de la pose des briques cuites pour annoncer le démarrage de la construction du pont sur Logone entre Yagoua (Cameroun) et Bongor (Tchad), le maître de la cérémonie annonce l’entretien du chef de l’Etat avec la presse. Du coup, une voix rauque traverse le micro : « une seule question ! Une question seulement ! » Et puis, comme un perroquet, le journaliste désigné pour ce spectacle tend le micro et récite la question préparée à l’avance par le club des doyens de l’ONAMA. Le même scénario a été reproduit à Laï dans la Tandjilé. Avec une grosse différence. Cette fois-ci, pour réussir le direct, les journalistes et/ou techniciens désignés pour tendre le micro se sont mis à genoux devant le président de la République. Un professionnalisme démesuré. S’agit-il du respect de l’éthique et de la déontologie dont on parle à longueur de journée dans ce pays ? Assurément non ! Voilà donc ce qui peut faire retourner Hervé Bourges, le fondateur de l’école de journalisme de Yaoundé dans sa tombe ; puisqu’on assiste ici à un culte de la personnalité.

 

Ce n’est pas tout. De Bongor (Mayo-Kebbi) à Moundou (Logone Occidental) en passant par Laï (Tandjilé), des groupuscules d’hommes politiques et d’anciens ministres ont envahi nos provinces, faisant suite à la délégation présidentielle. Chacun cherchait à se placer au bon endroit pour être dans l’angle de perception du président Déby. Le même décor est reproduit lors de la tournée de Déby au Nord du pays. A l’exemple de la poule d’Hitler, les anciens ministres et d’autres politiciens suivent servilement le président Déby comme des idiots. C’est bien cela, ce que Georges Dougueli de Jeune Afrique appelle “l’affrontement pour des positions de rente et d’influence“. Les anciens ministres que Déby Itno a déjà jetés dans la poubelle comme des mouchoirs kleenex veulent  être recyclés pour se remettre au service du Docteur anti-terroriste. Et pour parvenir à leurs fins, tous les moyens sont utiles. A travers des gestes magnifiques et parfois serviles, tels des disciples d’une organisation occulte, ces personnalités laissées en jachère ont les mains remplies de fanions du Mps. Ceux qui sont encore dans le gouvernement de la 4ème République portent autour du cou l’étole aux couleurs du Mps. Un signe ostentatoire de leur appartenance et de leur dévotion pour le parti dont Idriss Déby en est le président-fondateur.

C’est un art difficile, mais certains le pratiquait  déjà sous le règne de Hissein Habré. Une vénération démesurée. Au Tchad, la glorification du président n’agace personne, mais c’est une pratique ravageuse. Le danger de ce culte vient du fait que les personnes qui se vouent à cette pratique participent à leur propre aliénation. La prolifération des ministres kleenex et d’autres thuriféraires de Déby pendant les visites à l’intérieur du pays est non seulement un manque à gagner pour l’administration publique, mais un phénomène inquiétant. Pourtant, Idriss Déby Itno n’a pas besoin de cette pression psychologique pour appeler une personnalité à son gouvernement. Il n’a pas, non plus, besoin de ces pseudos natifs pour visiter une localité. De l’avis de plus d’un observateur, les ministres kleenex font le commerce de leur image pour être rappelés, un jour, à la mangeoire. Cette technique d’approche inutile les embarque d’ailleurs dans des luttes d’égo. Chaque zélateur cherche à tenir le haut du pavé pour ses intérêts personnels. Chacun veut être présent aux agapes présidentielles afin de créer une occasion pour redonner les gages de son attachement à Idriss Déby. Avec de telles pratiques, il n’y a pas de lueur pour l’unité nationale. Les thuriféraires de Déby veulent du pain et non la liberté !Le zèle des ministres kleenex et d’autres laudateurs de Déby est ce qu’il y a de pire en démocratie. On ne force pas le retour en grâce dans un Etat de droit. Il est temps de mettre fin à cette pratique qui risque de faire du président Idriss Déby, un despote de la carrure de Mussolini, de Staline ou de Hitler. Ce serait pire pour ce pays qui n’a pas encore cessé de pleurer ses morts et de panser les blessures laissées par le régime de l’ancien dictateur.

Collaboration Journal Eclairages/Regards d’Africains de France

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