Editorial : Tout doit être fait pour garantir au peuple tchadien des pourparlers francs et sincères, dépourvus de tout agenda caché, d’intrigues partisanes sordides

Initialement prévu le 27 février dernier, le pré-dialogue entre le pouvoir de transition et les mouvements politico-militaires s’est ouvert le 13 mars 2022 à Doha au Qatar, à plus de 3500 kms du Tchad, malgré quelques soubresauts enregistrés lors de la cérémonie d’ouverture. Une cinquantaine de groupes rebelles identifiés prennent part à ce pré dialogue censé fumer le calumet de la paix entre Tchadiens. Pari tenu, peut-on valablement l’affirmer, malgré la méfiance, la suspicion et la rancœur des uns envers les autres. Sans le dépassement de soi, les négociations échoueront lamentablement. Vue l’immense attente des Tchadiens, ni les négociateurs du gouvernement de transition, ni les politico-militaires n’ont intérêt à se fourvoyer. Les parties prenantes doivent se concentrer à la seule chose primordiale à laquelle tous les citoyens aspirent de nos jours : la PAIX.

Loin d’être le fruit d’un décret quelconque, la paix est un processus, un mode de vie, un chantier permanent, selon l’ancien président portugais Jorge Sampaio. Pour y parvenir, chacun doit apporter sa pierre à l’édifice de sorte que la confiance regagne peu à peu les cœurs et les esprits. Tout doit être fait pour garantir au peuple tchadien des pourparlers francs et sincères, dépourvus de tout agenda caché, d’intrigues partisanes sordides. Le gouvernement de transition aux manettes s’honorerait à laisser se dérouler les travaux dans un esprit pragmatique empreint d’un sursaut patriotique. Malgré l’éviction suspecte de l’ancien président Goukouni Weddeye, il y a lieu d’accorder le bénéfice de doute à l’actuel comité spécial chargé de conduire les négociations avec les politico-militaires. Cependant, les Tchadiens sont loin d’être dupes et tiennent à l’œil tous ceux qui sont coptés pour constituer la délégation gouvernementale conduite par l’homme du sérail, l’ambassadeur Cherif Mahamat Zene. C’est tout simplement une reprise en main d’un dossier éminemment important qui semble échapper au contrôle du gouvernement de transition.

Sinon pourquoi débarquer l’équipe du Comité Technique Spécial à seulement 04 jours des pourparlers de Doha ? Que veut-on réellement cacher au peuple tchadien ? Ou du moins quel message veut-on envoyer et à qui à travers ce changement in extrémis du Comité technique spécial ? Quelle belle et ridicule improvisation, a-t-on envie de dire !Pourtant, qui mieux que Goukouni Weddeye et son équipe ont la meilleure maîtrise du dossier et logiquement aptes à négocier avec les politico-militaires au nom du gouvernement de transition dont ils sont l’émanation.Après tout, force est de constater qu’ils inspirent mieux confiance aux yeux de leurs frères rebelles que cette cohorte hétéroclite emmenée par le ministre des Affaires étrangères, visiblement en service commandé plus que pour autre chose.S’agissant des politico-militaires, les Tchadiens attendent d’eux responsabilité, dépassement de soi, l’esprit de pardon et la bonne foi, sans lesquels les conclusions de l’actuel pré-dialogue et les futures assises du dialogue national inclusif seront vouées à l’échec.Le Tchad est à la croisée des chemins et il appartient, aujourd’hui, à ses filles et ses fils d’être au rendez-vous de l’histoire pour enterrer définitivement la hache de la guerre.

Moussa S.Yowanga