6 Mai 2010
Photographe inconnu
-Qui êtes-vous madame l'artiste chanteuse?
Je suis la cinquième d’une fratrie de six enfants dont quatre filles et deux garçons. Audrey Djendangde c’est mon nom figurant sur mon acte d'état civil et Audrey Lynda Shey c’est celui d'artiste.
-Combien d'albums avez-vous déjà produit et avec quels moyens?
Actuellement j’ai produit un album sur le marché et le second va bientôt sortir. Je précise que c’est une autoproduction autrement je l’ai fait avec mes propres moyens.
-Pourquoi êtes-vous devenue chanteuse ? Etait-ce un choix facile ?
Je n'ai pas vraiment choisi d'être chanteuse. Je dirai plutôt le milieu dans le quel je suis née et ai grandi qui m’a permis de devenir ce que je suis. Je note au passage que la musique pour moi est une affaire de famille puisque mon petit frère y est et mon grand frère a aussi un studio d'enregistrement.
-De qui vous vient cet art pour lequel peu des femmes tchadiennes manifestent leur désir ?
Cet art m'est venu de mon père qui était un prince choyé et toujours entouré par les griots en bon fils unique. Il en était tellement imprégné au fil de temps qu’il finit par acquérir lui même le savoir faire transmis à ses enfants.
-Quel sens donnez-vous à votre engagement pour la chanson ? Etait-ce juste par plaisir de chanter ou c’est une façon pour vous de transmettre des messages à la société tchadienne largement divisée ?
Pour moi, chanter c'est transmettre des message. Tous mes textes sont engagés.
-On vous voit parfois presque à poils, tête bien rasée alors que vous vivez dans une société pudique et très religieuse. Ne pensez-vous pas que cela peut être interprété comme un manque de respect ou à la limite la conséquence d’une éducation ratée?
Presque a poils ! Personne ne m’a jamais vu a poils, même dans la cour de ma maison. En tout cas, jusqu’à preuve du contraire, je suis bien éduquée, Je me respecte et respecte tous ceux qui sont autour de moi. Chanter ne veut pas dire s'exposer le corps dénudé. Je ne me permettrai jamais l'audace de me montrer à poils. Je suis désolé mais cette question ne me concerne pas. Oui, je me suis rasée la tête mais ce n’est pas synonyme de prostitution ni de mauvaise éducation... Tenez vous bien, il m’arrive même parfois de porter de pagne lors de mes spectacles... Je défie quiconque m’avoir vu à poils.
-Quels sont les thèmes abordés dans vos chansons et dans quelles langues exprimez-vous pour faire passer vos messages ?
Je chante pour les enfants de la rue, les orphelins, pour la femme et ses conditions de vie par exemple pour dénoncer les avortements. Je chante la paix, la solidarité et l'unité africaine. Je chante aussi mettre en garde les gens contre les maladies comme VIH/ Sida et les MST, le palu chez les femmes enceinte et le bébé. Généralement je chante en français, en anglais et l’arabe local mais aussi en ngambaye ma langue maternelle, le bakka…
-Comment peut-on définir le rythme Audrey Lynda Shey ?
Parlant du rythme, j'avoue que je suis incapable de me donner une étiquette. En tout cas, beaucoup considèrent que c’est du world musique... Alors tant mieux.
-Dans l’une de vos chansons de votre première album, vous abordez le thème relatif à l’éducation des enfants, alors que vous n’étiez pas du tout mère. Est-ce cela a du sens et pertinent pour une personne sans aucune expérience dans ce domaine ?
-Jusqu’à maintenant, je n’ai pas encore donné naissance à un enfant. Mais je crois vraiment avoir raison de parler de l'éducation des enfants et aussi de l’espacement des naissances...
Au Tchad, on aime procréer mais après sept ans, les gosses sont laissés à la merci du bon Dieu. Je crois que Dieu m'a sauvé de justesse la vie en m’épargnant ce triste sort de devenir enfant de la rue
-Le Tchad connaît de graves difficultés dans tous les domaines. Quels sont, selon vous, les maux qui minent aujourd’hui la société tchadienne ?
S’agissant de cette question, je pense très honnêtement que la nature même n’est pas clémente à notre égard avec la température avoisinant souvent 48°C. C’est par coup de chance que tout le monde ne pète pas les plombs sous cette canicule.. Tout le monde est tendu.Ce n’est pas étonnant de compter des centaines de bagarres par jour. D’autres raisons comme le chômage, la présence de ce fameux pétrole qui fait plutôt la bonne affaire des expatriés, l’impunité ou la justice à deux vitesses où il y a d’un côté les intouchables et de l’autres des coupables participe à alourdir le climat social dans ce pays.La retraite au Tchad est un véritable cauchemar pour ceux qui en droit. La fonction publique est truffée des personnes âgées incapables de vous faire le travail en un temps record . Un autre problème de taille c’est le manque d’électricité et d'eau potable